Vacances inconnues

C’est un voyage à Naples, et dans ma valise je ramène des photographies de famille, chinées dans un grand coffre en bois qui sentait bon le vieux.
Fragments de vie passée, pantalons d’époque et cheveux gominés : ils posent. Premiers congés pour tous, nouveaux souliers, l’ouvrier voit la mer, photo souvenir. On pense à envoyer des cartes postales. Elle, sur ce balcon, je me demande si c’est à son fiancé derrière la caméra qu’elle sourit. Portrait de chez le photographe avec une dédicace que je ne comprends pas, écrite au stylo bille bleu.

Alors que mes photos d’une ville visitée mille fois depuis Dante, que disent-elles, sinon la banale répétition d’un paysage, d’une veduta ? Aussi anonymes que le sable des plages, toujours foulé et recyclé par la mer. Mais ces visages, c’est comme s’ils sortaient de mes placards, et que je pouvais demander à ma grand-mère « et elle, c’est qui ? » et qu’elle me répondait « ta grande tante X avant de se marier ».
Ils sont sans noms, mais non sans âme ; ils me sont plus familiers que tous ces rochers et ils me racontent tout bas la vie italienne du siècle dernier.

